21 Juin 2014
15 jours en autonomie totale à travers l'Islande
Je ne savais pas qu'il existait, encore aujourd'hui, un pays sauvage si proche de la France.
La facilité avec laquelle nous nous sommes retrouvés débarqué de l'autocar, Loïc et moi, au milieu de nulle part, moins de 24h après notre départ de Paris, est ahurissante. Il suffit de revenir un clic en arrière pour comprendre l’enchaînement des événements.
Le premier clic de souris, a eu lieu des années auparavant, lorsque je préparais ma première « grande » randonnée : de Paris à Marseille à pied (l'objet inital de ce blog). Je lisais attentivement tous les conseils prodigués par d'autres randonneurs, sur un site dédié à la marche ultra légère, quand je suis tombé par hasard sur le récit d'un gars parti faire la traversée de l'Islande à pied. Je suis resté stupéfait devant la beauté des photos d'une part et hypnotisé par l'aventure que cela devait représenter. A ce moment là je me disais que ce genre d'expéditions était réservé à quelques « aventuriersaguerrisdelextreme » ! Bref, pas pour moi. Mais certains clics me font plus penser à un effet de cliquet, comme une roue crantée qui s'enclenche et qu'il est impossible de faire revenir en arrière.
Le deuxième clic s'est produit lorsque j'ai commencé à parler de ce projet à la volée et que Loïc, un ami grimpeur et alpiniste, a tout de suite mordu à l'hameçon. Après ma traversée des Alpes, je cherchais en effet un nouveau projet. C'est là que l'idée d'une virée en Islande est revenue. Avec l'expérience acquise au cours du Paris-Marseille et la traversée des Alpes du Léman à Menton (ma seconde grande randonnée), cette virée me semblait abordable même si la part d'aventure était nettement plus importante que dans tous mes projets précédents.
Maintenant que nous étions deux, le projet commençait à devenir concret. A force de discussions, pendant un an, nous avons délimité les frontières de ce qui nous semblait faisable, fait le tri entre nos fantasmes et la réalité, pesé ce qui nous apparaissait raisonnable et écarté ce que nous sentions instinctivement comme trop dangereux ou incertain...
Le troisième clic, le plus facile à faire, c'est lorsque j'ai acheté les billets d'avion sur internet. Partir en Islande est beaucoup plus simple que de vouloir aller d'une banlieue parisienne à une autre avec le RER. Pas de correspondance, aucune histoire de zone tarifaire. Simple comme bonjour, il n'y a aucune formalité administrative pour les ressortissants français. Armé d'un billet d'avion et d'une carte d'identité, vous vous retrouvez 4 heures plus tard en plein cœur de Reykjavík !!
Il est 1 heure du matin quand nous nous enfonçons dans nos sacs de couchage moelleux et agréables sous notre petite tente ultra compacte et légère.
Il fait jour, nous sommes au milieu d'un océan de tentes de toutes les couleurs et des grappes de jeunes déambulent à travers le camping rejouant le festival de Woodstock, des joints et des bières plein les mains. Nous avons à peine pu trouver 2 mètres carré pour planter notre abri, le festival du solstice d'été bat son plein à 100m du camping. Nous sommes le 22 juin 2014.
Les contrées sauvages semblent à la fois si proches et si lointaines...
En cherchant le sommeil, alors que Loïc dort déjà depuis longtemps, je me remémore toutes les étapes de la préparation de notre voyage.
Il y a un an, pile, lors d'un rassemblement d'alpinisme, je parlais à Loïc de mon envie d'aller randonner à travers l'Islande, pendant plusieurs semaines en autonomie. Parti de cet embryon, nous avons commencé à rêver la suite : traverser des glaciers, gravir des sommets, traverser des rivières à gué, se perdre dans des déserts de sable, affronter les moustiques, se baigner dans des sources chaudes … tout cela nous l'avons presque vécu.
Avec gourmandise, nous avons lu les récits d'autres randonneurs, parcouru les forums. Nous avons discuter avec passion de l'équipement, fallait-il emmener une corde et des crampons ? Nous avons étudier les solutions les plus adaptées pour franchir les rivières à gué.
Nous avons ébauché à grand trait l'itinéraire. Compte tenu du temps restreint dont nous disposions, nous avons écarté la traversée Nord-Sud classique qui s'effectue en 3 semaines, pour une trace originale. Nous avons emprunté le départ de cette traversée classique au Sud puis bifurqué en suivant un cap au nord-ouest. La fin de ce périple est resté flou... Nous avions évaluer à 4 jours de marche la partie de Skogar jusqu'au Landmanalaugar. Encore 4 jours pour rallier le Kerlinggarfjöll. Il nous restait 6 jours sur le papier pour rejoindre la capitale ! Durée qui nous semblait raisonnable quelque soit le point GPS ou nous nous trouverions à ce moment là.
Avec minutie, nous avons pesé chaque objet de notre paquetage pour réduire au maximum le poids, calculer les rations journalières de nourriture. Autant de sujets passionnants et sérieux dont seul un marcheur ultra léger peut comprendre l'importance. Nous sommes partis quelques jours au mois de mars dans les Vosges pour tester notre matériel, les rations ainsi que l'entente entre nous. Malgré une météo plutôt rude, rassurés sur tous les points, même si nous n'étions pas spécialement inquiets, nous avons continué la préparation.
Ce voyage, nous l'avons rêvé, imaginé, fantasmé, commencé dans nos têtes bien avant le 21 juin 2014...